NEW YORK NE REPOND PLUS (1975)

Dans le vaste paysage du cinéma de science-fiction des années 1970, The Ultimate Warrior (1975), réalisé par Robert Clouse, s’impose comme une œuvre singulière, une œuvre singulière, à la fois modeste dans ses moyens et ambitieuse dans sa portée. Réalisé par Robert Clouse, cinéaste surtout connu pour avoir dirigé Bruce Lee dans Enter the Dragon (1973), ce film marque une incursion audacieuse dans la science-fiction dystopique, portée par une vision artistique cohérente et une interprétation magnétique de Yul Brynner. The Ultimate Warrior naît dans un contexte où le cinéma post-apocalyptique connaît un essor fulgurant, porté par une fascination collective pour les lendemains de catastrophes. Le film s’inscrit dans une vague de productions des années 1960 et 1970, marquée par des œuvres comme Planet of the Apes (1968) ou The Omega Man (1971), où l’humanité, ravagée par des désastres écologiques, nucléaires ou biologiques, lutte pour sa survie. Robert Clouse, connu pour son travail sur Enter the Dragon (1973), s’inspire de ces récits tout en insufflant une vision plus intimiste, presque contemplative, centrée sur un microcosme de survivants dans un New York dévasté. L’idée d’un futur où la civilisation s’effondre sous le poids d’une pandémie mondiale (vraiment un sujet de SF) résonne avec les anxiétés de l’époque, marquées par la guerre froide et les crises environnementales émergentes. Le film tire également une influence notable du western, un genre cher à Clouse, qui avait déjà exploré des dynamiques similaires dans The Pack (1977). Ici, le héros solitaire, Carson, incarné par Yul Brynner, évoque le cow-boy errant, un archétype qui traverse les ruines urbaines comme un pionnier dans un Far West post-moderne. Cette fusion entre science-fiction et western confère au film une texture unique, où les luttes pour le territoire et les ressources rappellent les grandes épopées de l’Ouest américain.

Dans la filmographie de Robert Clouse, The Ultimate Warrior occupe une place à part. Après le triomphe mondial d’Enter the Dragon (1973), qui a redéfini le cinéma d’arts martiaux, et avant des projets plus confidentiels comme The Pack (1977), Clouse s’aventure ici dans un registre radicalement différent. Si Enter the Dragon brillait par son énergie cinétique et ses chorégraphies spectaculaires, The Ultimate Warrior mise sur une tension dramatique plus contenue, privilégiant l’atmosphère et la psychologie des personnages. Ce choix reflète la polyvalence de Clouse, capable de naviguer entre des genres aussi variés que l’action, le thriller et la science-fiction. Bien que le film n’ait pas atteint le même succès commercial, il démontre son audace à expérimenter avec des récits plus sombres et introspectifs, préfigurant son intérêt pour les récits de survie dans des contextes extrêmes. Dans la filmographie de Clouse, The Ultimate Warrior occupe une place à part. Moins spectaculaire que ses films d’arts martiaux, il révèle une facette plus contemplative de son cinéma. Le réalisateur, sourd depuis l’âge adulte, travaille avec une précision visuelle remarquable, Il s’appuie sur ses assistants pour orchestrer les dialogues, mais son sens visuel reste indéniable, compensant l’absence d’audition par une attention méticuleuse à la composition des plans et à la gestuelle des acteurs. Ce handicap, loin d’être un obstacle, semble avoir affiné son sens du rythme et de la narration visuelle. Il privilégie des plans larges pour souligner l’isolement des personnages dans l’immensité des ruines, alternant avec des plans rapprochés pour capter les émotions brutes, notamment lors des confrontations entre Carson et les pillards. Cette approche équilibrée confère au film une tension constante, où chaque scène semble à la fois intime et oppressante. Clouse utilise également la lumière naturelle pour accentuer le réalisme, jouant sur les ombres pour créer une atmosphère de menace omniprésente.

Yul Brynner, dans l’un de ses derniers rôles au cinéma, incarne Carson, le guerrier taciturne engagé pour protéger une enclave de survivants. Sa présence physique, son crâne rasé emblématique et son regard perçant confèrent au personnage une aura mythique. Brynner, déjà légendaire pour ses rôles dans The King and I et The Magnificent Seven, apporte ici une gravité et une intensité qui transcendent les limites du scénario. Carson n’est pas un héros classique : il est pragmatique, presque désabusé, mais animé par une lueur d’espoir face à la possibilité d’un renouveau annoncant ainsi le Max de The Road Warrior). Brynner excelle à transmettre cette dualité, rendant chaque regard, chaque geste, chargé d’une intensité dramatique qui ancre le film dans une humanité tangible. Chaque apparition de Carson à l’écran est marquée par une tension palpable, une économie de gestes et une efficacité dramatique qui rappellent les héros stoïques du western classique.

La conception artistique de The Ultimate Warrior est un tour de force, compte tenu des contraintes budgétaires (moins d’un million de dollars). Tourné principalement sur les backlots de Warner Brothers et de MGM, le film transforme ces espaces en une vision d’un New York post-apocalyptique. Les décors, faits de bric et de broc, évoquent une ville désintégrée, envahie par la végétation et les décombres. La direction artistique, bien que rudimentaire, parvient à instaurer une atmosphère oppressante et crédible. Cette esthétique brute, presque documentaire, renforce l’immersion et contraste avec les ambitions plus grandioses de films comme Logan’s Run (1976). Les costumes, simples mais évocateurs, reflètent les divisions sociales du récit : les survivants portent des vêtements usés, tandis que les pillards arborent des tenues improvisées, symbolisant le chaos (préfigurant là encore le deuxième volet de Mad Max). Le montage, signé Michael Kahn (futur collaborateur de Spielberg sur Raiders of the Lost Ark), est sobre mais précis. Le rythme du film peut sembler lent selon les standards contemporains, mais il sert parfaitement le propos : dans un monde où le temps semble suspendu, chaque geste compte, chaque décision est lourde de conséquences. Le montage accentue cette lenteur volontaire, créant une atmosphère de suspense et de fatalité.

L’interprétation de The Ultimate Warrior repose sur un casting soigneusement choisi. Outre Brynner, Max von Sydow, dans le rôle du Baron, livre une performance nuancée, mêlant autorité et désespoir. Connu pour ses collaborations avec Ingmar Bergman , von Sydow apporte une profondeur tragique à ce leader visionnaire mais dépassé par les circonstances. Joanna Miles, dans le rôle de Melinda, ajoute une touche de chaleur humaine, Et c’est un plaisir de retrouver cette trogne de William Smith, en tant qu’antagoniste brutal, incarne une menace physique palpable (Any Which Way You Can, Le riche et le pauvre). Ce casting, bien que limité par le budget, fonctionne grâce à la complémentarité des acteurs, chacun apportant une dimension distincte à l’ensemble. La bande-son, composée par Gil Mellé, compositeur également actif dans le jazz et la musique électronique connu pour son travail sur The Andromeda Strain (1971), crée une partition minimaliste mais évocatrice, mêlant des sonorités électroniques à des motifs orchestraux. Cette musique, parfois dissonante, reflète l’angoisse d’un monde en désintégration, tout en soulignant les moments d’espoir, notamment lors des scènes où la communauté défend son jardin. Bien que moins mémorable que les grandes partitions de l’époque, elle s’intègre parfaitement à l’esthétique du film, renforçant son atmosphère oppressante. L’utilisation du silence est également notable : dans plusieurs séquences, l’absence de musique renforce la tension et l’immersion. Malgré un succès commercial modeste (près de 9 millions de dollars de recettes pour un budget d’un million), The Ultimate Warrior porte en lui beaucoup d’éléments du cinéma post-apocalyptique contemporain.

Conclusion :The Ultimate Warrior est une pépite méconnue qui mérite d’être redécouverte pour sa sincérité et son ambition. The Ultimate Warrior n’est pas un blockbuster, ni un chef-d’œuvre flamboyant. C’est un film modeste, sincère, porté par une vision claire et une exécution rigoureuse. Il témoigne du talent de Robert Clouse à raconter des histoires de survie et de combat, même en dehors du registre martial. Il offre à Yul Brynner un rôle à la hauteur de son charisme, et propose une réflexion pertinente sur les enjeux de la civilisation et de la barbarie.

Ma Note : B+

Un commentaire

  1. Bonne ideeyque d’exhumer cette vieille peluche de série B post-Apo, une sorte de prolongement de l’excellent « Soleil Vert » de Fleischer dans une société pré-Mad Max. Brynner s’était déjà taillé une place dans la SF westernienne avec « Mondwest ». Je le trouve un peu moins convaincant en guerrier torse nu qu’en cyborg programmé pour tuer.

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