Un Jake Gyllenhaal halluciné est notre guide dans l’enfer de la chasse aux scoops sur fond d’un inquiétant Los Angeles nocturne pour ce premier film du scénariste Dan Gilroy. Une véritable réussite.
Quand on croise pour la première fois le personnage de Lou Bloom à l’écran il est en train de dérober du cuivre sur un chantier, errant dans Los Angeles la nuit en quête de rapines il va à l’occasion d’un accident de la route dont il est témoin trouver sa voie : devenir « Stringer » ces cameramen indépendants qui filment les scènes de crimes ou d’accidents pour les revendre aux télévisions locales. S’achetant un scanner pour écouter les fréquences de la police et une caméra il recrute un SDF comme « stagiaire » pour le guider à travers L.A . Nouant une relation trouble avec Nina productrice pour une télévision locale en perte de vitesse il va trouver sa voie dans ce métier..à tout prix.

Au cœur de Nightcall / Nightcrawler on trouve la composition hallucinée d’un Jake Gyllenhaal ayant perdu prés de dix kilos pour construire la silhouette de ce personnage à l’allure de spectre hantant les nuits de la métropole californienne. Avec son visage émacié dévoré par ses yeux immenses, un sourire mécanique, le débit monocorde avec lequel il expose à ses interlocuteurs son discours « managérial » formaté il parvient à provoquer physiquement le malaise. Sans passé ni attaches émotionnelles à l’exception de la plante verte qu’il arrose dans son petit studio, Lou Bloom est un charognard qui prospère sur la décrépitude morale , un sociopathe avec un business plan. Si les yeux sont la fenêtre de l’âme les siens ouvrent sur une abîme glaçante.
La force du film vient de la fascination qu’on éprouve pour ce personnage amoral sans etre jamais en empathie avec lui.
Même si Jake Gyllenhaal est omniprésent dans chaque scène Gilroy l’entoure de seconds rôles solides René Russo (son épouse à la ville) en productrice qui se laisse entraîner dans une relation d’attraction-répulsion assez malsaine avec Lou. Bill Paxton a peu de présence à l’écran mais il est parfait dans ce personnage de charognard grande gueule.Mais c’est l’acteur britannique Riz Ahmed qui fait la meilleure impression dans le rôle de l’assistant de Lou.

La photographie nocturne au teintes phosphorées de Robert Elswit , directeur de la photo de Paul Thomas Anderson mais aussi des films de Tony Gilroy (Michael Clayton , Duplicity et Bourne Legacy qui produit le film de son frère) sublime un Los Angeles nocturne jamais aussi bien rendu depuis le Collateral de Michael Mann. Le troisiéme frere Gilroy, John assure le montage.
Si Nightcrawler est essentiellement un film d’ambiance à l’atmosphère lourde et malsaine il offre deux grandes scènes de tension ou la mise en scène nerveuse de Gilroy à la violence très brute fait merveille.
Conclusion : En dépit de quelques longueurs et d’un scénario qui pousse parfois les limites de la crédibilité pour parvenir à ses fins NightCall nous offre un voyage au bout de la noirceur de l’âme humaine dominé par la performance glaçante de Jake Gyllenhaal.
Ma Note : A –
Nightcall de Dan Gilroy
Sortie le 26/11/2014