Comme le Millenium de David Fincher, Le Bonhomme De Neige adapte un best-seller nordique (ici un livre du norvégien Jo Nesbø) , met en scène des crimes en série et voit des acteurs anglo-saxons incarner des personnages scandinaves sur le lieu de l’action du roman. Ce sont bien les seuls points communs que vous pourrez trouver entre l’œuvre de Fincher et le nouveau film du pourtant talentueux réalisateur suédois Tomas Alfredson (Morse et La Taupe) qui s’avère être un ratage quasi complet.
Harry Hole (Michael Fassbender) est un ivrogne, passant ses nuits sur les bancs des parcs et les trottoirs. Il est resté proche de son ex-compagne Rakel (Charlotte Gainsbourg), désormais en couple avec un médecin Mattias (Jonas Karlsson), et veut rester une figure paternelle pour son fils adolescent Oleg (Michael Yates). Il habite un appartement rongé par les moisissures, (ALERTE MÉTAPHORE !) reflétant son âme fatiguée. Mais Hole est aussi un détective brillant qu’une affaire de disparitions en série de femmes va remettre en selle. Avec sa nouvelle collègue Katrine (Rebecca Ferguson), il va bientôt faire le lien entre son enquête et une affaire non résolue vieille de plusieurs années qui s’était arrêtée à la mort d’un enquêteur Rafto (Val Kilmer) tout aussi tourmenté que lui. Bientôt l’affaire s’élargit, un politicien douteux (J.K Simmons) et un chirurgien plastique interlope (David Dencik) entrent dans la danse, ainsi qu’un mystérieux personnage qui nargue Hole sous la forme de lettres énigmatiques qu’il signe « Le Bonhomme de neige ».
L’histoire présente tous les éléments d’un thriller captivant et ambigu, ce qui a sans doute attiré l’attention de Martin Scorsese qui devait à l’origine mettre en scène le projet dont il demeure producteur exécutif. Tous les ingrédients sont réunis pour faire du Bonhomme de neige un excellent film : un solide casting qui entoure l’intense Michael Fassbender de Rebecca Ferguson la découverte de Mission Impossible Rogue Nation à Charlotte Gainsbourg (qui après Independence Day: Retaliation poursuit la culture des navets) en passant par J.K Simmons (Whiplash), une équipe technique qui compte des pointures du calibre de Dion Beebe (Collateral, Miami Vice ) et la monteuse attitrée de Scorsese himself, Thelma Schoonmaker. Pourtant le vrai mystère du Bonhomme de neige n’est pas celui au cœur de son intrigue mais bien de comprendre comment Tomas Alfredson, qui avait pourtant impressionné avec ses deux derniers films, Morse (2008) et La Taupe (2011) est arrivé à un tel ratage avec tant de talents rassemblés. Même la performance de Michael Fassbender, intense mais trop appliquée ne peut élever ce thriller désordonné et confus.
L’aspect « whodunit » est brouillon si bien que lorsque le détective Rafto (un Val Kilmer diminué par la maladie dont les répliques semblent doublées par un autre comédien) apparaît, le spectateur est longtemps perplexe car rien n’indique, à travers la mise en scène qu’il s’agit d’un flash-back. La complexité de l’intrigue n’est pas ici preuve de sophistication, elle apparaît alambiquée (et c’est un euphémisme) et se repose sur une multiplication de fausses pistes grossières où se croisent des personnages caricaturaux comme le politicien pervers incarné par J.K Simmons. Ces fausses pistes qui occupent pourtant une grande partie du métrage sont abandonnées très vite quand l’intrigue principale reprend ses droits. Ce qui ne serait somme toute pas si gênant si le spectateur n’avait pas toujours trois coups d’avance sur les protagonistes désamorçant l’intérêt de l’enquête et si le serial-killer n’avait pas des motivations digne d’un mauvais slasher des années quatre-vingt. Le film est parcouru d’incohérences et le spectateur doit fournir un immense effort pour comprendre les motivations qui animent Katrine à agir de la sorte dans le troisième acte du film.
On sent que Alfredson lorgne vers la série britannique Wallander et vise une froideur clinique toute nordique mais c’est plutôt du coté de Derrick qu’il fini par atterrir avec ces longues scènes où l’ennui le partage au malaise qui naît de voir des acteurs qu’on apprécie se débattre avec un matériel qui frise le ridicule. Plastiquement si émergent parfois quelques plans enneigés à la poésie hivernale, la terne photographie de Dion Beebe semble elle aussi sortir d’un téléfilm allemand. Le montage déborde de transitions maladroites qu’on croiraient intentionnellement comiques tant elles semblent sorties de La Cité de la Peur (le film de les Nuls). La musique du pourtant talentueux Marco Beltrami (cela revient beaucoup dans cette critique) est au diapason de l’ensemble en surlignant grossièrement toutes les péripéties.
Conclusion : Maladroit et ridicule, gâchant avec méthode les talents rassemblés pour lui donner vie ce Bonhomme de Neige disparaîtra vite des mémoires comme neige au soleil…
Ma Note : D
Le bonhomme de neige (The Snowman) de Tomas Alfredson (Sortie le 29/11/2017)