PREDATOR 2 (1990)

Dès 1988, la Fox cède à l’éditeur indépendant Dark Horse les droits d’exploitation en bande dessinée d’Aliens. Le succès est immédiat. Fort de cette réussite, Dark Horse obtient ensuite les droits de Predator et publie en 1989 une mini-série écrite par Mark Verheiden (Timecop) et illustrée par Chris Warner, qui rencontre à son tour un grand succès.
L’histoire met en scène un inspecteur de police, parent du personnage incarné par Schwarzenegger dans le film original, confronté à un Predator en pleine vague de chaleur à New York. En enquêtant sur un trafic de drogue, il découvre un complot gouvernemental visant à exploiter la technologie des chasseurs extraterrestres.Le succès du comic pousse le producteur Joel Silver à convaincre la Fox de lancer une suite. Le scénario est confié à Jim et John Thomas, auteurs du premier film, qui intègrent certains éléments issus de la BD, notamment l’idée d’une grande métropole — Los Angeles remplaçant New York pour des raisons budgétaires. Une scène emblématique, où le Predator brandit le crâne d’une victime sous l’orage, devait d’ailleurs se dérouler initialement au sommet du Chrysler Building. Si le premier Predator reposait sur le concept “Schwarzenegger contre Alien”, ses éléments les plus iconiques — design de la créature, arsenal, mandibules (suggérées par James Cameron) — furent en réalité élaborés tardivement sur le tournage par l’équipe de Stan Winston. Predator 2 va, lui, établir les fondations du mythe : le Predator n’est plus un monstre isolé mais le membre d’une civilisation guerrière dont la culture repose sur la chasse. Le film révèle qu’il s’agit d’un jeune chasseur en rite d’initiation, que ces créatures sont attirées par les zones chaudes et conflictuelles, et que le gouvernement connaît leur existence depuis bien avant les événements du premier film. Enfin, Predator 2 réalise un vieux rêve de fans : dans la salle des trophées du vaisseau, un crâne de xénomorphe trône parmi les autres — un clin d’œil explosif qui scelle la rencontre entre deux mythologies majeures du cinéma de science-fiction.

Dans la lignée du premier film, qui mêlait film de monstres et film de guerre, Predator 2 remplace ce dernier par un thriller policier musclé. Au début des années 1990, ce genre est marqué par la thématique du trafic de drogue — en pleine effervescence sous la War on Drugs lancée par Reagan — et par la violence des gangs, bientôt omniprésente dans la pop culture. Arnold Schwarzenegger, devenu méga-star, refuse de reprendre son rôle. La Warner souhaitait imposer Steven Seagal, mais Joel Silver puise dans son carnet d’adresses et confie finalement le rôle principal à Danny Glover. Celui-ci incarne le lieutenant Mike Harrigan, un flic vétéran du Los Angeles “futuriste” de 1997. En traquant le baron jamaïcain King Willie (Calvin Lockhart), dont le gang terrorise la ville, Harrigan se heurte à Peter Keyes (Gary Busey), un agent fédéral obsédé par la capture du Predator. Lorsque des trafiquants — puis des policiers — sont retrouvés éviscérés et suspendus comme du gibier, l’affaire devient personnelle.Le choix d’un policier vieillissant, “trop vieux pour ces conneries”, à la place d’un héros bodybuildé, confère au film une identité singulière. Glover incarne un antihéros plus humain, ancré dans la réalité, qui contraste avec la surenchère d’action et de violence voulue par Hopkins. Pour recréer l’esprit de camaraderie du commando du premier volet, Harrigan est entouré d’acteurs à “gueule” : Ruben Blades, Robert Davi, Maria Conchita Alonso et Bill Paxton, ce dernier retrouvant un rôle de grande gueule rappelant Hudson d’Aliens — un clin d’œil qui renforce le lien entre les deux franchises. Il devient d’ailleurs le premier acteur de l’histoire à être tué par un Terminator, un Alien et un Predator.

Après avoir confié Die Hard 2 à Renny Harlin (réalisateur du quatrième Freddy), Joel Silver fait appel à Stephen Hopkins, metteur en scène du cinquième volet (L’Enfant du cauchemar). Ancien collaborateur de Russell Mulcahy sur Highlander et ancien dessinateur pour Marvel UK, Hopkins partage le goût de son mentor pour une mise en scène graphique et cinétique, proche de l’esthétique du comic book. Predator 2 est un film excessif, qui pousse délibérément les curseurs de la violence et du gore. Moins élégant que McTiernan mais plus frénétique, Hopkins imprime une énergie folle à sa caméra virevoltante, tournant dans les quartiers les plus dangereux de Los Angeles — où l’équipe découvrit même un cadavre pendant le tournage. Avec le directeur photo Pete Levy, il compose des ambiances quasi expressionnistes, notamment dans la séquence sous lumière ultraviolette où Keyes tente de piéger la créature. Le film flirte parfois avec le fantastique, comme lors de la confrontation entre King Willie, adepte du vaudou, et le Predator dans une ruelle. Pour renforcer cette atmosphère singulière, Hopkins s’entoure du légendaire Lawrence G. Paull (Blade Runner, Retour vers le Futur), qui conçoit les nouvelles armes du chasseur — la lance rétractable, le Smart Disc, le filet tranchant — et imagine l’intérieur du vaisseau, d’inspiration aztèque. Cette scène finale, spectaculaire, contribue à faire de Predator 2, sans égaler l’original, un film marquant, violent et stylé, emblématique des excès visuels du cinéma des années 90.

Conclusion : Predator 2 est une suite audacieuse qui affirme sa propre identité. Sous la direction nerveuse de Stephen Hopkins, le film fusionne habilement thriller policier et science-fiction fantastique, tout en s’inscrivant dans l’air du temps marqué par la guerre contre la drogue. Sans surpasser le film de McTiernan, il enrichit durablement l’univers du Predator et demeure, plus de trente ans après sa sortie, l’une des suites les plus singulières et sous-estimées du cinéma d’action.

Ma Note : B+

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