Suicide Squad

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Suicide Squad est indubitablement un film malade , malade des luttes intestines entre un réalisateur voulant pousser une version qu’il veut sombre et chaotique mais pas forcément maîtrisée et un studio qui  se comporte avec ses adaptations de comics comme le chien qui chasse sa propre queue pensant rattraper les critiques négatives sur Batman v Superman en transformant cette version superhéroique des Douze Salopards en un film pop et fun dans la veine des Gardiens de la Galaxie.

Hélas Suicide Squad  n’a pas le charme, subversivement innocent de l’opus James Gunn tantôt  ultra-rapide ou lent , adoptant  une palette fluo  avant de basculer dans les ténèbres le film semble être en proie à une lutte de versions concurrentes qui le rende thématiquement et structurellement confus.

Le film s’ouvre par  l’introduction de chaque membre de l’équipe par Amanda Waller (Viola Davis) à l’origine du projet de Task Force X  via de courtes séquences clippesque précédées d’un graphique expliquant qui ils sont. Cette entrée en matière  parvient à retranscrire le feeling de la lecture des comics,  je la soupçonne de faire partie du montage commandé par la Warner et j’y vois la patte du fraîchement nommé Geoff Johns  grand manitou de DC comics qui aime ce procédé dans les comics qu’il écrit.

Mais après une telle introduction alors qu’on s’ attend à des séquences ou les membres de l’équipe vont se rencontrer et s’entraîner , on a affaire à une présentation redondante des personnages avant de basculer immédiatement vers la mission finale qui voit l’escadron envoyé vers Midway city ou a émergé le grand méchant du film qui semble attendre tranquillement son arrivée . Si il il pâti du réarrangement des séquences qui nuisent parfois à la compréhension (on réalise bien tard que Waller est sur place) , de scènes d’action pas toujours lisibles et de choix de design parfois douteux ce deuxième acte qui voit la Task Force X arpenter une cité évacuée livrée aux forces maléfiques évoque l’ambiance d’ Escape from New York (les explosifs dans le sang dont sont dotés les membres de l’équipe pour les contrôler est un hommage au film de Carpenter mais figure déjà dans le comics originel).

Le troisième acte est  le plus problématique d’une part parce qu’il  repose encore  sur le cliché désormais récurrent des films de super-héros d’ un portail qui s’ouvre au bout d’un rayon lumineux dans le ciel – quoi que dans le cas de Suicide Squad le plan des méchants, le point noir du film,  est si flou qu’on ne connait  vraiment ni sa nature ni sa fonction- protégé par une  horde de créatures servant de chair à canons . D’autre part, parce que le genre nécessite que nos anti-héros se rassemblent avant l’assaut final, le script leur ménage une pause ou dans leurs dernieres minutes ces personnages qui n’ont eu que mépris les uns pour les autres se considèrent comme faisant partie d’une même famille d’outsiders. Cette évolution dictée par la mécanique du genre et non par l’interaction des personnages n’est pas « méritée » et sonne faux comme du Walt Disney dans un film de Peckinpah. Pire Captain Boomerang (Jay Courtney assez bon malgré sa réputation et un perso sous-écrit)  déserte l’équipe avant de revenir sans la moindre explication quelques minutes plus tard dans une scène ou l’équipe marche en slow-motion vers la bataille finale . Cette verrue visiblement  imposée par le studio tranche avec l’aspect plus nihiliste du reste du métrage.

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Les MVP du film Deadshot (Will Smith) et Harley Quinn (Margot Robbie)

Paradoxalement j’ai passé un très bon moment  tout d’abord parce qu’Ayer a la chance d’avoir dans son casting d’authentiques superstars :  un Will Smith au top de sa forme qui apporte sa présence magnétique à son personnage de Deadshot et se fait le vecteur idéal des dialogues badass d’Ayer.  Margot Robbie est éclatante même si  certains  dialogues  censés convaincre les gens autour  qu’elle est vraiment dingue  apparaissent un peu « forcés ». Le film laisse entendre  que sa folie apparente est une façade destinée à cacher le fait qu’en l’absence du Joker dont elle est follement amoureuse  elle cache un coeur d’or la réduisant a un statut réducteur de petite amie, malgré tout la jeune australienne dévore l’écran et transcende les faiblesses du personnage.

Si je n’ai pas vraiment adhéré à la version du Joker présentée ici qui m’a semblé assez confuse sans doute parce que beaucoup de ses scènes (meme si le Joker a toujours été prévu pour n’être qu’un personnage secondaire du film) ont été tronquées j’ai apprécié l’aspect « Bowie période  Thin White Duke » que Jared Leto lui donne et suis confiant qu’avec plus d’espace pour le développer il saura être très convaincant dans le rôle.

J’ai en revanche été agréablement surpris par le personnage de Diablo et le jeu de Jay Hernandez  le plus développé du film (et quelque part son vrai héros) à qui Ayer donne un poignant monologue.

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The Joker : the clown pimp of crime

Viola Davis est la retranscription parfaite de la Amanda Waller des comics, Ayer la rend encore plus impitoyable que sa version papier et l’actrice parvient à rendre même des dialogues d’exposition passionnants. Joel Kinnaman qui remplace au pied levé Tom Hardy est un miscast dans le rôle de Rick Flag le relai implacable sur le terrain de Waller et semble tout aussi instable que les membres de l’équipe. Son manque de charisme déséquilibre le rapport de force qui devrait s’établir avec Deadshot.

Si la réception critique du film n’aura pas permis à Warner de s’en servir pour établir un ton définitif pour les films du DCEU, Suicide Squad a le mérite d’ouvrir considérablement son univers cinématographique. Ayer fait ainsi se côtoyer  méchants de Batman et Flash,  méta-humains ou sorcières de façon naturelle. J’ai aimé la façon dont il a utilisé Batman (Batfleck !!!) vu du point de vue de ses vilains. Il n’hésite pas à faire des choix graphiques audacieux : les déguisements des hommes de main du Joker ou celui du méchant dont  je dois être un des seuls à apprécier le design  que j’ai trouvé « Kirbyen » . Et il réussi quelques séquences visuellement splendides comme la « renaissance » d’Harley Quinn dans les cuves de la Ace Chemical.

Au final je doute que le film avec son énergie foutraque un peu adolescente aurait été fondamentalement différent sans les remontages imposés par la Warner. Pas plus que les autres genres  les CBM n’ont pour obligation d’être tous des films profonds comme The Dark Knight, le Suicide Squad de David Ayer avait vocation à être cette série B  parcourues de quelques fulgurances et de moments nanardesques  en quelque sorte le reflet de beaucoup de comics de super-héros mainstream  qu’il adapte et c’est déjà pas mal.

Ma Note : B-

Suicide Squad de David ayer (sortie le 03/08/2016)

 

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