Le réalisateur de The Machinist met en images un scénario de jeunesse de Tony Gilroy avec en tète d’affiche les vedettes de Gone Girl et Mad Men souhaitant s’inscrire dans la veine des grands thrillers politiques des années 80. Mission accomplie ?
Les thrillers d’espionnage ont la vie dure ces temps-ci, l’actualité contemporaine dépassant souvent la fiction la plus folle ce qui donne à Opération Beyrouth un charme rétro indéniable puisqu’il se situe dans la capitale libanaise en pleine guerre civile à quelques semaines de l’invasion israélienne en 1982. Quand un agent américain Cal Riley (Mark Pellegrino) est pris en otage Mason Skiles (Jon Hamm), ancien diplomate américain à Beyrouth, devenu médiateur des conflits de travail à Boston, qui passe son temps dans les bars tentant de noyer dans l’alcool les souvenirs de ce qui lui est arrivé une décennie auparavant – Mason et sa femme Nadia (Leila Bekhti) avaient accueilli Karim (Yoav Sadian Rosenberg), 13 ans, un réfugié palestinien orphelin sans se douter que son frère aîné , Abu Rajal (Hicham Ouraqa), était un terroriste qui tua Nadia dans un assaut mené pour récupérer son frère – est rappelé dans la ville pour négocier la libération de l’otage son meilleur ami à l’époque.
Des Bourne à Michael Clayton le scénariste Tony Gilroy est un habitué des intrigues complexes mêlant des barbouzes et personnages tourmentés , rédigé en 1991 le script d’Opération Beyrouth est en quelque sorte le prototype de son oeuvre. Il brode une intrigue solide qui utilise le contexte politique complexe de l’époque, qu’il parvient à restituer assez clairement , comme toile de fond à des enjeux plus humains. On y retrouve son écriture laconique et son sens aigu des personnages et des dialogues. Traité comme un thriller où pris dans les machinations du Mossad, de la CIA, des ravisseurs et de l’OLP Skiles tente de garder une longueur d’avance avec l’aide de Sandy Crowder (Rosamund Pike), Opération Beyrouth repose moins sur des événements politiques libanais spécifiques que sur des idées plus universelles sur la trahison, la loyauté. Brad Anderson (the Machinist), qui dit avoir été inspiré de films comme L’Année de tous les dangers (Peter Weir 1982), restitue bien l’ambiance de la ville déchirée par la guerre civile même si il se repose sur la lumière jaunâtre qui semble être la palette de référence d’ Hollywood pour représenter le Moyen-Orient, il fait avancer l’intrigue sans en sacrifier la complexité et même si elle nous est parfois familière l’aborde avec un niveau d’intelligence souvent absent des thrillers récents. Il pèche en revanche à lui donner une énergie et un rythme assez soutenus pour vraiment accrocher le spectateur.
Mason aurait pu être juste un autre homme brisé à qui le danger offre une rédemption mais Hamm donne à son héros un sens des responsabilité et une sincérité qui lui évite d’être simplement un mélange de James Bond et de Don Draper, lançant des one-liners avec insouciance. Rosamund Pike dont le personnage efficace et énigmatique est le pendant parfait à la lassitude décontractée de Hamm offre encore une nouvelle fois une prestation très solide et donne au film un duo engageant. Ils sont entourés d’une pléiade d’acteurs familiers des amateurs de série télévisées (Mark « LOST » Pellegrino , Dean « Breaking Bad » Norris , Jonny « Blacklist » Coyne) de vieux briscards qui donnent assez de charisme à des personnages peu approfondis.