GREEN BOOK : Sur les routes du sud (Critique)

On peut voir dans ce duo  d’acteurs  un film sentimental et simpliste toutefois  si il est classique dans sa structure Green Book est un film drôle,  bienveillant : un grand film populaire. Le film de Peter Farrelly  fonctionne  comme un Miss Daisy et son chauffeur à l’envers , avec ce voyage dans le racisme vécu  par deux stéréotypes bien connus des spectateurs . Le titre de cette histoire vraie (co-écrite par le fils du personnage incarné par Viggo Mortensen) vient du nom d’un guide, qui proposait aux personnes de couleur un hébergement sûr dans les villes où sévissaient la ségrégation.  «Tony Lip» Vallelonga – (Viggo Mortensen) un brutal videur de New York italo-américain  (Le vrai Lip deviendra plus tard  acteur  dans Le Parrain, Goodfellas et Les Sopranos)  est engagé pour conduire et protéger Don ShirleyMahershala Ali, superbe), un pianiste de jazz noir capricieux  dans une tournée du Sud profond. Tony accepte  à contrecœur mais il n’est pas nécessaire d’être devin pour prévoir que les deux hommes – aussi différents qu’ils puissent être, avec Tony le  dur  qui a encore beaucoup de chemin à faire en matière de tolérance et Don est calme et distingué – se lieront d’amitié  au cours de leur périple de huit semaines avant Noël , qui sépare Tony de sa femme (Linda Cardellini) et de ses enfants forgeant ce qui deviendra le lien de toute une vie.

Tony  a du mal à garder le silence que lui demande son précieux client et commence à disserter  à propos de Little Richard, du poulet frit ou de la bonne façon d’écrire une lettre d’amour, et dans ces scènes d’échanges les deux acteurs parviennent à moduler leurs interprétations  avec des nuances inattendues et une vraie générosité.  Si vous vous souvenez des précédents films que le réalisateur de Green Book, Peter Farrelly, a réalisés avec son frère Bobby (Mary à tout prix , Dumb and Dumber) vous retrouverez  ici le mélange de grossièreté et de cœur , deux marques de fabrique des Farrellys. Le film crée une friction entre les personnages qui s’atténue à mesure de leur conversations – avec une mécanique un peu calculée, certes, mais qui apparaît rafraîchissante  à notre époque de polarisation politique et la division raciale – en s’efforçant manifestement d’être édifiant et de construire des ponts.

Viggo Mortensen a toujours été un acteur polyvalent du roi de la terre du milieu au diable en passant par Freud ou un exécuteur de la mafia russe il a tout joué, mais ici, on découvre son timing comique  et un talent pour incarner la naïveté tourmentée  de Tony. Le Dr. Don Shirley d’Ali est un brillant maestro au piano, célébré dans les plus belles demeures et salles de concert du monde. Il a joué deux fois pour le président en exercice et vit dans un somptueux appartement au-dessus de Carnegie Hall. Ali fait un travail remarquable en canalisant la créativité de Shirley et en soulageant sa colère face au racisme systématique que ses performances semblent masquer. Il communique ses émotions aussi bien en un coup d’œil ou un doigt levé qu’en un long monologue.

Le scénario écrit par Farrelly, Brian Currie et le fils de Vallelonga, Nick – est assez balisé et passe par des étapes attendues, à mesure que le duo s’enfonce dans le Sud, il rencontre des formes de racismes des plus insidieuses aux plus violentes. Intelligemment , aucune de leurs tribulations ne prend un tour vraiment dramatiques ou horrifiques, les personnages endurent plutôt des moments d’oppression quotidiens ce qui se convient bien au ton  résolument optimiste sans toutefois éluder l’horreur de ce racisme endémique. L’attachement  fini par naître entre les membres de ce duo improbable  à travers des crises et des échanges pittoresques où chacun des protagonistes fait un pas vers l’autre. Le ton est sentimental mais l’ alchimie véritable entre les comédiens  (Linda Cardellini est aussi géniale , dans le rôle petit mais crucial d’épouse de Tony.) élève le film de Farrelly à un niveau supérieur. Personne n’est complètement transformé ou « racheté » ici, on se donne juste un espace pour développer le respect mutuel et l’affection. Le grand succès de Green Book réside dans sa modestie et dans la manière simple dont il reconnaît le changement sismique dans le retournement progressif du cœur humain.

Conclusion : Green Book est  un amalgame  de comédies, de road-movie, de fable  et de lecon d’histoire  accessible,  qu’il  mélange   avec une aisance à la fois détendue et judicieusement calibrée.Dans un monde qui semble de plus en plus laid, la simple humanité de ce petit récit se ressent comme une pommade.

Ma Note : B+

Green Book de Peter Farrelly (sortie le 23/01/2019)

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