FREAKY (Critique)

Au sein de la maison Blumhouse, la société de production de Jason Blum incontournable dans le domaine de l’horreur,  des succès de films low-cost comme les Paranormal Activity au triomphe critiques et public de Get Out, Christopher Landon (fils de l’acteur Michael Landon, star de la télévision que les plus anciens connaissent comme Charles Ingalls le père de La Petite Maison dans la Prairie ou l’ange des Routes du Paradis)  après avoir œuvré comme  scénariste sur les suites de Paranormal Activity  s’est taillé un petit fief avec le succès de Happy Birthdead et de sa suite. De la même manière qu’il avait interprété le concept de Un jour sans fin sous un angle horrifique il revient ici avec un concept à la fois improbable mais évident d’une fusion entre Freaky Friday un film Disney de 1976 avec Jodie Foster (et son remake de 2008 avec Jamie Lee Curtis et Lindsay Lohan) où une adolescente et sa mère échangent leurs corps et la série des Friday the 13th  dans laquelle le tueur au masque de hockey massacre des dizaines d’adolescents délurés (Freaky Friday the 13th était d’ailleurs le titre de travail du film). Après une ouverture classique  où le Boucher de Blissfield un analogue de Jason Voorhees massacre un groupe d’adolescents utilisant une bouteille de vin cassée , un siège de toilette en passant par une raquette de tennis , il s’attaque à une adolescente  mal dans sa peau Millie Kessler, encore dans le deuil de son père avec une dague aux vertus magiques qui échangent leurs esprits. Millie a alors 24 heures pour un nouvel échange sinon elle finira prisonnière du corps du meurtrier chassé par toutes les polices.

Après des scènes classiques du genre  « d’échanges d’esprit » où le psychopathe s’émerveille d’être dans le corps  d’une jolie blonde et Millie découvre l’aspect pratique de  faire pipi debout, elle , objet de brimades dans son lycée prend un certain plaisir à avoir désormais une présence physiquement intimidante, tandis que le tueur réalise  qu’il ne peut plus utiliser la force brute pour attaquer  ses victimes et doit s’adapter. Il fini par profiter des gens qui sous-estiment les adolescentes pour les attirer dans ses pièges meurtriers. Commodément, les premières cibles du boucher sont les personnes qui ont fait de la vie de Millie un enfer,  la méchante  Ryler (Melissa Collazo) et un cruel enseignant (Alan Ruck l’ainé des Roy de la série Succession). Millie, dans le corps du boucher parvient à convaincre ses meilleurs amis Nyla (Celeste O’Connor) et Josh (Misha Osherovich) de sa véritable identité. Pendant ce temps, le tueur dans le corps de Millie prend une nouvelle allure sexy et trouve des moyens nouveaux et créatifs pour poursuivre ses massacres. Amis spécialistes du « méta » passez votre chemin si  Christopher Landon  à la manière du Wes Craven de Scream  se moque des conventions du genre  (alors que deux adolescents fuient le tueur , l’un d’eux dit: «Tu es noir, je suis gay, nous sommes  morts!») il s’amuse avant tout à appliquer les codes des deux genres, le teen-movie et le slasher avec délectation pour ranimer l’esprit des VHS du samedi soir ! Bien qu’il donne à son film une sensibilité queer  il n’utilise pas l’échange entre  Millie et le Boucher pour remettre en question les stéréotypes sur l’identité de genre préférant enchainer les scènes horrifiques imaginatives et les séquences comiques donnant à son film un rythme véloce. Avec Freaky  il montre une parfaite connaissance et une authentique affection pour le genre et ses codes.  Il fait de multiples clins d’œil aux classiques (l’apparence du tueur, son masque et sa nature mutique renvoie directement à Jason Voorhees, sa manière d’incliner la tète  en observant une de ses victimes qu’il vient d’empaler évoque Michael Myers et un plan vu du dessous de Millie tentant de forcer la porte derrière laquelle se sont réfugiés ses victimes réplique celui du Shining de Kubrick) et soigne des meurtres délicieusement gore avec des gros plans des victimes coupées en deux par une scie circulaire , décapité à la tronçonneuse ou empalé sur une lance. Son directeur de la photographie le britannique  Laurie Rose (collaborateur attitré de Ben Wheatley) donne au film une signature visuelle en accord avec l’énergie pop de Landon ,  ses teintes roses et fluorescentes sont comme une version bubblegum de l’univers chromatique du giallo.

Beaucoup de la réussite du film tient au casting de Vince Vaughn, longtemps abonné à des rôles comiques (Wedding Crashers et Dodgeball) il a pris depuis  la deuxième saison de True Detective un virage dramatique renforcé par sa participation à deux films de S.Craig Zahler Section 99 et Trainé sur le bitume. Fort de ces expériences il parvient ici à être convaincant à la fois en psychopathe traquant silencieusement ses victimes, arme à la main,  apparaissant soudainement dans un parking vide, un brouillard vaporeux  autour de son immense silhouette ET en adolescente avec des problèmes de confiance en soi. Sa stature imposante, c’est vraiment un colosse, et son écart de taille (il mesure 1M96)  avec l’ensemble de ses partenaires adolescents sert son personnage dans les deux aspects du film il apparait ainsi authentiquement menaçant quand il incarne le tueur et maladroit avec son cops disproportionné quand Millie y est coincée. Le succès de sa performance est qu’il ne se repose pas sur l’aspect purement burlesque de la situation, il a même deux scènes émotionnelles avec  des personnages de l’entourage de Millie. Ainsi une  conversation dans une cabine d’essayage  avec sa mère , qui n’a aucune idée qu’elle parle à sa fille et donne à Millie une chance d’être honnête sans aucune crainte. Une autre où elle déclare sa flamme toujours dans le corps de Vaughn au sportif dont elle est amoureux en secret. Kathryn Newton établit Millie comme une jeune fille hésitante, moquée par ses camardes plus fortunées, luttant pour se remettre de la mort de son père avant de composer une attitude tout aussi crédible quand l’esprit homicide du Boucher s’empare d’elle. Ce n’est pas seulement sa nouvelle tenue  : un rouge à lèvres rouge vif (ou plutôt rouge sang) et une veste de moto badass qui nous font accepter sa transformation. Newton perfectionne un regard impitoyable, plein de ressentiment et un gloussement  maniaque quand elle échappe à la police qui font perdurer la menace du tueur même dans un corps d’un mètre soixante-cinq.  Elle compose enfin quand elle retrouve son corps une  Millie transfigurée par l’expérience qui peut aux cotés de sa mère et sa grande sœur (Dana Drori ) affronter le tueur dans une variation intelligente du cliché de la « final girl ».

Conclusion : Drôle , rythmé et sanglant, paradoxalement, alors qu’il reprend des conventions bien connues du spectateur Freaky  parvient à  avoir un ton original, preuve que Christopher Landon est vraiment un nom à suivre dans le genre horrifique.

MA NOTE : B+

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