« Le Hobbit un voyage inattendu » est un film que j’avais révisé à la baisse à chaque nouvelle vision, plombé par des problèmes de rythme et pas uniquement à cause de son prologue , je trouvais que Peter Jackson alignait de façon assez mécanique des péripéties qui ne parvenaient pas à me faire m’investir dans le sort de ses personnages.Comme une impression que le cœur n’y était plus pour celui qui fut contraint de mettre en scène cette nouvelle trilogie après le départ de Guillermo Del Toro. A t’il redressé la barre avec cette « Désolation de Smaug »?
Nous retrouvons après un court flash-back la compagnie des nains (plus Gandalf et Bilbo of course), talonnés par les Orcs d’Azog qui trouve un refuge temporaire auprès de Beorn un être qui a le don de changer d’apparence, avant de poursuivre le périple qui va les conduire à travers les bois noirs de Mirkwood (ils croiseront des créatures parmi les plus attendues des lecteurs du livre original) jusqu’au cœur des monts Brumeux ou les attend le terrifiant dragon Smaug, alors que Gandalf doit faire face à la résurgence d’un mal ancien.

La désolation de Smaug bénéficie à plein de l’effet « épisode du milieu » les enjeux étant posés l’action peut démarrer plusvite, l’injection de nouveaux personnages (parfois bien connus) elfes et humains apporte de l’oxygène à la narration de cette seconde partie. Ces nouveaux protagonistes sont assez réussis, on retrouve avec plaisir Legolas , ici véritable Terminator elfique , mais surtout agréablement surpris par le personnage de Tauriel et le jeu de son interprète Evangeline Lilly qui donne à la série une vraie héroïne d’action (son personnage ne figurant pas dans l’oeuvre originale). Lee Pace (Guardians of the Galaxy) impose une présence ambiguë en roi des Elfes de la foret. Luke Evans toujours bon même dans des films moyens apporte une humanité bienvenue à son personnage de Bard, son arche narrative en fait un héritier du personnage de Viggo Mortensen. Bien plus à mes yeux que celui de Thorin (Richard Armitage) que les auteurs tentent de positionner en substitut d’ Aragorn de manière parfois artificielle y compris avec un prologue très familier. On s’attache plus au destin des nouveaux venus qu’à la compagnie des nains même si les interprètes ne sont pas en cause, Martin Freeman est excellent pourtant on peine à s’investir émotionnellement dans son Bilbo personnage finalement trop passif dans l’intrigue.
Le principal bémol tient justement à ce que l’adaptation du roman primesautier de Tolkien est enchâssé dans la structure d’une prequel à la trilogie de l’Anneau baigné dans une atmosphère sombre et inquiétante. Ainsi on insiste sur le caractère maléfique de l’Anneau et son influence néfaste sur Bilbo , les Orcs sont sans cesse aux trousses de la compagnie des nains tels qu’ils l’étaient à celles de la communauté de l’Anneau mais paradoxalement leur quête apparaît bien accessoire face au danger que constitue l’ascension du Nécromancien.

Sur le plan technique le niveau des effets encore plus élevé , le rendu des créatures est somptueux avec à tout seigneur tout honneur Smaug, auquel Benedict Cumberbatch prête ses mouvements et bien sur son incroyable voix parvenant avec l’aide des animateurs de Weta à faire du saurien un personnage à part entière.Une gageure puisque il s’agit ne s’agit pas d’une créature humanoïde. A noter la photographie d’Andrew Lesnie toujours magnifique. Enfin la mise en scène de Jackson peut être porté par les ambiances plus sombres se montre plus inspiré, la vision de cette cité lacustre corrompue parcourue de canaux semi-gelés est saisissante.

Mais c’est bien sur sur les grandes scènes d’action qu’on attend le bonhomme, on retrouve avec joie dans les morceaux de bravoure que constituent les séquences de Mirkwood et celles des tonneaux le Peter Jackson de King Kong et de la trilogie de l’Anneau.Elles sont généreuses et inventives la ou la scène des gobelins du premier volet apparaissait mécanique et impersonnelle. La confrontation avec Smaug est bien sur spectaculaire mais souffre d’un cas de « climaxus interromptus » le cliffhanger intervenant de manière trop abrupte.C’est le revers de l’effet « épisode du milieu » évoqué plus haut , cette structure en trois films si elle pèse moins que sur « Le voyage inattendu » déséquilibre énormément le film.