[Blast from the past] – La Valse des pantins

MovieCovers-168568-200726-LA VALSE DES PANTINS Cinquième collaboration entre Martin Scorsese et Robert Deniro, « La valse des pantins » (titre français idiot de « King of Comedy ») est peut être le moins connu en tout cas parmi les plus méprisé du duo. Pourtant  le film s’inscrit avec le recul parfaitement dans l’oeuvre de  Scorsese et constitue un film étonnement prophétique.

Rupert Pupkin n’a qu’un rêve : devenir un grand comique. Un soir, à la sortie d’un enregistrement du talk-show de la vedette  l’animateur vedette, Jerry Langford, il parvient à l’accompagner (contre son gré) dans sa limousine. Persuadé que c’est le signe du début de sa grande carrière, Rupert n’aura de cesse de harceler Jerry pour être invité dans son show … King of Comedy (laissons tomber l’inepte titre français) suit directement Raging Bull dans la filmographie du tandem Scorsese / DeNiro , projet apporté par ce dernier qui mit du temps à convaincre Scorsese de le réaliser, celui-ci ayant du mal à le rattacher à sa propre expérience. Le film est un peu considéré comme le canard boiteux de leur collaboration pour plusieurs raisons, d’abord son échec commercial cuisant,  l’ombre de Raging Bull,  la difficulté de le placer dans un genre défini (ni comédie ni drame) et la surprise de voir DeNiro pour la première fois loin de ses rôles sombre de « tough guys » . King of Comedy est  un film qui est arrivé trop tôt ou trop tard  trop tard car sil date du début des années 80 il est bien le dernier vestige du cinéma de cette parenthèse enchantée du cinéma des années 70 qu’enterrera l’échec en 1980 des portes du  Paradis de Cimino. Trop tôt car il anticipe (même si  le meurtre de John  Lennon par Mark Chapman et l’attentat contre Reagan par un fan de Jodie Foster sont encore frais quand le film sort) le phénomène qu’on appelle aujourd’hui le « fan entitlement » la notion qu’ont certains admirateurs fanatiques que leurs vedettes préférées leurs « doivent » quelque chose, sentiment qui pousse les plus fragiles qui se sentent rejetés dans les pires extrémités.Mais il est aussi visionnaire de ce besoin de reconnaissance et de réussite  à travers la célébrité pour la célébrité qui a pris des proportions inimaginables à notre époque de télé-réalité triomphante. La France n’a pas donné bon accueil au film en partie car ils e déroulait dans le monde des talk-show et des comiques stand-up totalement inconnu sur nos cotes à l’époque. Pourtant le recul nous fait découvrir une oeuvre  tout à fait cohérente dans la filmographie de Scorsese qui constitue même le complément idéal à son Taxi Driver tant  Rupert Pupkin et Travis Bickle semblent être les deux facettes d’une même névrose.

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Le King Of Comedy Ruper pupkin (Robert deNiro) dans son royaume.

Tous deux partagent isolation et solitude, même si la mère de Pupkin est présente par la voix (de la mère de Scorsese d’ailleurs), qui tournent à la paranoïa . Pupkin vit dans un monde fantasmatique illustrée par des séquences de rêve (les plus réussies du film) ou Scorsese emploie parfois la vidéo comme dans cette séquence qui nous le présente invité vedette du talk-show de Jerry Langford ou l’ancien principal de son lycée vient s’excuser de l’avoir mal considéré et fini par célébrer en direct son mariage avec l’objet de son affection Rita (Diahnne Abbott compagne de deNiro à l’époque). D’ailleurs Pupkin et Bickle sont tous deux aussi inadaptés dans leurs relations amoureuses comme le montre leur façon maladroite d’aborder celles qu’ils veulent séduire. Dans les deux films cette cour culmine  par une scène provoquant le malaise : le rendez-vous au cinéma porno dans Taxi driver et le « week-end » dans la propriété de Jerry Langford dans King of Comedy. Enfin tout deux au stade terminal de leur névrose vont accomplir  un acte extrême qui va avoir un dénouement étrangement positif. C’est une occasion unique de voir  DeNiro au sommet de son art d’aborder de manière différente deux personnages ayant tant en commun. Pupkin est certes moins « intense » mais si il est au final finalement inoffensif le comédien parvient à faire poindre sous le raté une facette très sombre.

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Les Affranchis (Jerry Lewis, Robert DeNiro, Martin Scorsese)

Le film est connu pour être le rôle sérieux du comique Jerry Lewis, qui à l’époque aux US est bien loin de sa gloire passée, objet de raillerie pour être adoré par les français il finira par jouer dans la série Z  « Par où t’es rentré? On t’a pas vu sortir »de  Philippe Clair au coté de Marthe Villalonga ! Il est  excellent ici  tout aussi sobre dans le drame qu’il fut exubérant dans la comédie, son Jerry Langford est une vedette misanthrope finalement tout aussi isolé à sa manière  dans sa réussite que Pupkin l’est dans son échec . Au détour d’une scène il livre sa propre névrose à Pupkin et sa complice. La pression continuelle de l’audience, l’attention des fans qui le privent d’une vie normale et son entourage fait de gens dont il ne peut jamais être de l’authenticité des sentiments. La scène ou il est abordé par une femme qui lui demande de parler au téléphone à un parent et qui face au refus de Langford lui souhaite de mourir du cancer (!) est tiré d’une anecdote  étant véritablement arrivé à Jerry Lewis. Scorsese lui a d’ailleurs confié la mise ne scène de cette séquence. En terme de mise en scène on retrouve d’ailleurs presque pour la dernière fois chez lui la peinture naturaliste de ce New York un peu interlope grouillant de marginaux qui  disparaîtra avec la « gentrification » de Manhattan. L’édition Blu-Ray de Carlotta films est une réussite tout d’abord grâce çà l’excellente version restaurée en HD et ses suppléments : – une réunion Scorsese , DeNiro, Lewis à l’occasion de la présentation de cette version au festival de cinéma de Tribeca, nouvelle occasion de constater a quel point le mariage Scorserse-DeNiro fut celui de la carpe et du lapin l’un étant aussi volubile que l’autre est mutique. -un making of du film qui date de la sortie DVD – mais surtout une interview très récente de la monteuse attitrée de Scorsese Thelma Shoonmaker  , elle y évoque Le Loup de Wall Street indiquant qu’il marque justement le retour depuis King of Comedy de l’imporovisation dans ses films, elle revient sur le film avec des souvenirs très précis et instructifs mais aussi plus généralement sur sa collaboration avec le cinéaste,ses méthodes et  l’évolution de son cinéma.

King of Comedy  si il n’atteint pas la perfection des chef d’œuvres de Scorsese mérite à l’occasion de sa sortie en Blu-Ray d’être redécouvert et ré-évalué dans la filmographie des deux génies italo-americains. 

Ma note : B+

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