BLACK ADAM (Critique)

Quand Black Adam débarque aujourd’hui sur nos écrans s’achève une genèse de plus de 15 ans depuis qu’en 2007 alors qu’on lui propose le rôle titre d’une adaptation de Shazam, Dwayne Johnson manifeste son envie d’incarner plutôt (pas le chien de Mickey) son antagoniste Black Adam et ce dans un film qui lui serait consacré. Durant ces quinze années le paysage des adaptations de comic-books a changé du tout au tout, en 2007 l’explosion du MCU n’a pas encore eu lieu pas plus que coté DC la trilogie Batman de Nolan depuis Warner jadis la référence dans le genre a tenté de rattraper le succès considérable du rival Disney, le Snydeverse a divisés les fans et les critiques malgré des scores au box-office honorables (quoi qu’en dessous des objectifs) avant d’exploser en vol et depuis la compagnie sous la direction de Walter Hamada producteur de la saga Conjuring, l’univers partagé le plus rentable de la firme, a repris en main le DCEU avec des films plus variés au sort commercial contrasté avec les plus grands succès de la firme (Aquaman, Joker) et des échecs commerciaux (Wonder Woman 1984, The Suicide Squad pourtant le meilleur du lot). Paradoxalement Black Adam marque la fin de cette ère Hamada ce dernier quittant ses fonctions après le rachat de la major par Discovery. Black Adam porte donc sur les puissantes épaules de Dwayne Johnson la responsabilité d’inaugurer une nouvelle ère pour l’univers DC au cinéma. Mais, peut-être la conséquence de son long process de développement le film apparait anachronique, comme une réponse à la première phase de Marvel Studios vieille de dix ans, une occasion manquée pour DC l’année où Marvel Studios a sans doute sorti ses trois films les plus faibles.

Après un prologue  se situant dans le passé de Kahndaq  un pays fictif du Moyen-Orient (substitut régulier de l’Irak dans les DC comics) narrant l’histoire de Teth-Adam (Johnson) pleine d’esclavage, de sorcellerie et de vengeance, nous basculons dans le présent, où le syndicat du crime connu sous le nom Intergang occupe la région avec ses mercenaires. Quand Intergang et la professeure d’université Adrianna Tomaz (Sarah Shahi) réveillent par inadvertance, en recherchant un artefact magique, Adam, un « métahumain de classe A » il fait rapidement sentir sa présence pulvérisant hélicoptères de combat et camions ce qui attire l’attention d’Amanda Waller (Viola Davis qui reprend son personnage des deux Suicide Squad)) de la Task Force X, qui demande à Carter Hall alias Hawkman (Aldis Hodge) de mobiliser l’équipe de super-héros de la Justice Society of America : Kent Nelson alias Docteur Fate (Pierce Brosnan) , Albert Rothstein, alias Atom Smasher (Noah Centineo) et Maxine Hunkel alias Cyclone (Quintessa Swindell) pour le neutraliser. Black Adam, est avant tout un  véhicule qui permet à Dwayne « The Rock » Johnson d’entrer dans le genre le plus populaire du moment, un film de divertissement qui après une ouverture lourde en exposition,  saute d’une scène d’action à l’autre à un rythme soutenu. son budget généreux (autour des 190 millions de dollars) lui permet d’être spectaculaire et massif même si ses enjeux, restent relativement modestes. En dépit des déclarations annonçant le  « Dirty Harry des superhéros » Black Adam est avant tout un film destiné au jeune public qui se concentre sur de vastes batailles entre des êtres surpuissants  dans lequel Johnson ex-star du catch se montre très à l’aise. Avec ses collaborations avec Liam Neeson (The PassengerNon-StopSans IdentitéNight Run), son excellent film de requins Instinct de survie ou ses films horrifiques (EstherLa Maison de cireJaume Collet-Serra a montré qu’il était un technicien doué et très versatile. Si sa première collaboration avec Johnson Jungle Cruise était sans doute son film le plus faible à ce jour il propose ici des visuels épiques parfaitement adapté au genre et n’hésite à repousser les limites du PG-13 de manière comique et violente tout en gardant un ton léger car cette violence absurde se fait au détriment des bad-guys (même si une séquence a plus sa place chez Asterix que dans l’univers DC). Mais les combats finissent par se ressembler en particulier dans un dernier acte qui tombe dans les pires clichés du genre avec un faisceau d’énergie vers le ciel et une bataille finale contre une créature en CGI qu’on semble avoir vu cent fois auparavant (même si Collet-Serrat y ajoute un hommage bienvenu à Ray Harryhausen). Ce méchant principal  Sabbac est le point faible du film, un des plus insipides de mémoire récente son manque de profondeur vide l’acte final de tout enjeu.

Black Adam se débat avec les mêmes problèmes qui tourmentent DC et Warner Bros. avec leurs adaptations de comics dès qu’elles touchent à des personnages puissants, ils apparaissent d’abord comme des super-héros et des dieux, mais leur aspect humain est rarement un facteur central dans l’histoire. Le script d’Adam Sztykiel, Rory Haines et Sohrab Noshirvani – même s’il évoque l’idée que les super-héros sont plus soucieux de maintenir le statu quo que de s’attaquer aux vraies injustices avant de la laisser tomber presque aussitôt qu’elle est exprimée – n’apporte rien de nouveau dans ses scènes de combat, son intrigue et sa structure que le public connait parfaitement après plus d’une décennie de films de super-héros. L’écriture précipitée ne permet pas de servir tous les personnages de la même manière. Nous aurions volontiers échangé la présence d’un agaçant sidekick adolescent sorti d’un film des années 80 avec plus de scènes avec les membres de la Justice Society. Une réussite à mettre à son crédit toutefois la fluidité avec laquelle Black Adam plonge le public dans ces parties moins connues de l’univers DC Comics, la mythologie de Shazam (Djimon Hounsou reprend son rôle du film de David Sandberg) est utilisée, Hawkman, Docteur Fate et les deux autres membres de la JSA sont introduits sans avoir recours à de longues scènes d’exposition didactiques. La plupart de leurs interactions concernent l’intrigue en cours même si des éléments biographiques y sont disséminés. De la même manière les liens du film avec d’autres films du DCEU se font de manière organique et la plupart des clins d’œil adressés aux lecteurs de comics sont assez subtils. Les films DC ont besoin d’une base sur laquelle s’appuyer pour bâtir leur univers et Black Adam offre ce qui pourrait être une base sur laquelle s’appuyer. On appréciera la transcription à l’écran des membres de la Justice Society fidèle sans chercher à les rendre « pratique ». Celles de Hawkman et Docteur Fate sont particulièrement réussies à nos yeux. De même la dernière évolution du costume de Black Adam semble sortir directement d’une planche de comics. Johnson rend justice au personnage à la fois brutal, confiant et déterminé, avec juste ce qu’il faut de profondeur et d’humour. Il s’amuse clairement à jouer Adam, mais apporte une certaine gravité au rôle et se soucie de le représenter d’une manière qui lui garantisse une place parmi les héros les plus identifiables de l’univers DC.

Du coté de la Justice Society of America, Aldis Hodge est solide en Hawkman, il est là pour souligner le choc entre les méthodes violentes de Black Adam et la vision du monde d’un héros plus traditionnel. Pierce Brosnan est quelque peu sous-utilisé en Dr. Fate mais il parvient à être divertissant. C’est assez étrange de voir l’ancien 007 courir avec ce casque doré sous le bras, faire des mouvements de la main et regarder parfois dans le vide pour paraitre énigmatique. Atom Smasher et Cyclone sont présents dans de nombreuses séquences d’action, mais ne sont là que comme des personnages secondaires, même s’il y a matière à des arcs plus significatifs pour eux dans de futurs films. En particulier pour Quintessa Swindell qui a une vraie présence à l’écran. Black Adam est un film qu’on sent conçu en comité marketing après avoir analysé les codes du genre, le matériau d’origines et les attentes des fans mais qui manque ainsi d’une identité qui lui est propre. La façon dont le film lorgne sur la formule Marvel Studios est symptomatique de la manière dont Warner Bros. tente de reproduire le succès de Disney. La visualisation des pouvoirs de Dr. Fate (même si les personnages ont toujours été similaires) est proche de celle de Docteur Strange, l’attitude d’Atom Smasher est un mélange du Spider-Man de Tom Holland, de Paul Rudd dans Ant-Man et de Deadpool, les premiers pas dans le monde moderne de Teth Adam rappellent ceux de Thor dans le film de Kenneth Branagh. Le décollage du vaisseau d’Hawkman décalque les films X-men de la Fox.

Conclusion : Black Adam est un divertissement super-héroïque un peu pompier mais tout à fait honorable plaisamment fidèle à l’esprit des comics qui l’inspirent mais qui manque d’une identité propre entre du Snyder light et du MCU-like.

Ma Note B-

Black Adam de Jaime Collet-Serra (sortie le 19/10/2022)

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