
Quand Shazam ! sort en 2019, il apporte une bouffée d’air frais au DCEU. Alors qu’il faisait (et fait) techniquement partie des tentatives de DC pour reproduire le succès de l’univers cinématographique Marvel, son histoire d’un orphelin doté de super pouvoirs évoquait des films comme Big de Penny Marshall ou les productions Amblin. Il apportait un optimisme qui avait manqué aux derniers film du DCEU et ne ressemblait pas à un énième exercice de « world building ». Hélas Shazam ! La Rage des Dieux a du mal à maintenir la nouveauté d’un Zachary Levi jouant Shazam, l’alter ego capé de l’adolescent Billy Batson (Asher Angel). Une partie du problème est ici conceptuel : le premier Shazam! fonctionnait sur l’humour que gênerait la découverte par Billy de ses pouvoirs et de sa famille d’enfants adoptés. Le parcours de ce gamin pour trouver sa place dans le monde tout en devenant un héros servait de moteur à l’intrigue. La découverte passée, Shazam et sa famille ne sont qu’une autre équipe de super-héros comme les autres qui doit sauver Philadelphie de diverses menaces Le plus gros problème du réalisateur David F. Sandberg étant de faire avancer l’histoire de chacun des protagonistes pour justifier cette suite.

Le film commence de manière prometteuse, alors que les filles d’Atlas – Kalypso (Lucy Liu) et Hespera (Helen Mirren) qui veulent venger la mort de leur père aux mains du sorcier (Djimon Hounsou) qui a légué ses pouvoirs à Shazam (Zachary Levi), l’alter ego adulte surpuissant du jeune Billy Batson (Asher Angel) débarquent dans un musée à Athènes pour voler le bâton magique que ce dernier avait précédemment cassé en deux. Pendant ce temps, notre héros, aux prises avec le syndrome de l’imposteur alors qu’il sent que les autres membres de sa famille recomposée l’admirent, doit maintenir l’unité de l’équipe. Freddy (Adam Brody à l’âge adulte, Jack Dylan Grazer à l’adolescence) aspire à son indépendance lorsqu’il attire pour la première fois l’attention d’une fille, Anthea (Rachel Zegler de West Side Story). La première séquence d’action du film où Shazam et son équipe viennent à la rescousse alors que le pont Ben Franklin de Philadelphie commence à s’effondrer, est réussie drôle et palpitante dans l’esprit du premier opus et évoque même avec plaisir le Superman de Richard Donner. Malheureusement, le reste du film ne parvient pas à conserver ce charme, l’intrigue semble emprunter à droite et à gauche – des dragons à la Game of Thrones, un stylo magique tout droit sorti de Harry Potter et des clins d’œil à la franchise Fast & Furious, plutôt que de puiser dans la mythologie des comics. Même si le réalisateur David F. Sandberg coordonne avec adresse les séquences d’action super-héroïques il fini par être débordé par ses effets numériques comme tant de productions super-héroïques récentes dans un final où les Filles d’Atlas enferment Philadelphie dans une bulle magique. Le talent de Lucy Liu et Helen Mirren dans le rôle des deux méchantes du film est plutôt gaspillé, elles n’ont ni d’envergure ni d’épaisseur et semblent sorties du cinéma des années 90. La production semble avoir passé plus de temps à concevoir diverses bêtes mythiques terrifiantes que les deux sœurs lâchent sur les habitants plutôt qu’à leur proposer des choses intéressantes à jouer. Certaines des créatures, pour être honnête, sont effrayantes et imaginatives (on apprécie le bel hommage au cinéma de Ray Harryhausen). Les racines du réalisateur dans le cinéma d’horreur rejaillissent à ce moment même si la séquence est une redite d’une scène du premier film.

Cela dit, de plus grandes grandes scènes d’action n’auraient probablement pas considérablement amélioré le film. Fondamentalement, Shazam ! la Rage Des Dieux souffre d’un déséquilibre : trop de Shazam et pas assez de Billy Batson. Billy est le personnage le plus intéressant, sur le point d’avoir 18 ans et de sortir du système de placement familial et il craint de devoir quitter sa famille. Cette anxiété motive son insistance à ce que lui et ses compagnons héros restent toujours ensemble. Cette intrigue était narrativement la plus prometteuse, mais c’est celle que le film abandonne le plus souvent, car elle abandonne Billy au profit de son alter-ego. Dans le rôle de Shazam adulte, Levi a les manières exagérées d’un enfant trop grand ce qui passait très bien dans le premier film, à petites doses, créant un contraste avec l’attitude plus maussade d’Angel. Construire un film entier autour de l’acteur plus âgé ne rend service à personne : Levi, 42 ans (qui n’est pas un mauvais acteur) doit toujours jouer l’avatar d’un autre personnage, il est donc coincé avec une performance qui est la photocopie d’une autre, tandis qu’Angel est largement absent.
Conclusion : Shazam! La Rage des Dieux n’est pas déshonorant c’est un divertissement plutôt rythmé, parfois drôle, compétent faute d’être inspiré (David Sandberg est un réalisateur solide) qui souffre en grande partie d’être la suite inférieure d’un premier film qui reste un bon souvenir.
Ma Note : C
Shazam! La Rage des Dieux de David F.Sandberg (sortie le 29/03/2023)