SPIDER-MAN : NO WAY HOME (Critique)

Le cliffhanger sur lequel s’était achevée précédente aventure de la version de Spider-man incarnée par Tom Holland, – née d’un accord historique entre Sony Pictures détenteur des droits cinématographiques du personnage et Marvel Studios (propriété de Disney) -, la révélation de l’identité secrète du tisseur par son adversaire Mysterio au moment de sa mort, laissait augurer d’un prochain opus différent. Mais jamais aurait-t-on pu imaginer trois ans en arrière (entre autres choses) que ce troisième volet prendrait une ampleur inédite grâce à la présence de Docteur Strange (Benedict Cumberbatch) et aux talents de négociatrice de la productrice Amy Pascal, le retour de personnages issues des précédentes incarnations de la franchise avec le retour de trois des méchants de la trilogie de  Sam Raimi et de deux vilains des films de Marc WebbSpider-Man: No Way Home s’ouvre quelques minutes à peine après la conclusion de Spider-Man: Far From Home Peter Parker est accusé du meurtre de Mysterio (Jake Gyllenhaal) qui a révélé au monde qu’il était  Spider-Man par une campagne médiatique menée par J. Jonah Jameson (J. K. Simmons). En plus des problèmes juridiques auquel il fait face, Peter, ses amis et sa famille voient leur vie entière plongée dans le chaos. Pour les sortir de cette situation, Peter demande de l’aide au Docteur Strange (Benedict Cumberbatch) son allié de la guerre de l’infinité qui se propose d’utiliser un sort qui fera oublier à tous l’identité secrète du héros. Malheureusement, l’incantation tourne mal, faisant pénétrer dans le MCU des adversaire de Spider-man issus d’autres univers. Peter doit donc trouver un moyen de les y  renvoyer – tout en leur donnant une seconde chance, la plupart ayant succombé face à leurs versions du super-héros.

Le concept de multivers, ironiquement  plus souvent attaché au DC Comics qu’à Marvel est devenu l’axe principal de développement du MCU post saga de l’Infinité inauguré avec la série Loki de Disney + (et qui se poursuivra dans Doctor Strange and the Multiverse of Madness de Sam Raimi) est le dispositif scénaristique qui permet de mélanger des franchises distinctes à un niveau jamais vu auparavant mais présente quelques écueils. Si il est formidable pour les fans de longue date de voir resurgir des personnages marquants  et de continuer leur développement, on risque de perdre le fil de celui de la version actuelle du personnage incarné par Tom Holland. En dépit des attentes démesurées qu’éveillent le  retour de personnages iconiques et de leurs interprètes, le scénario de  Chris McKenna et Erik Sommers (Jumanji, Ant-man et la guêpe) parvient à trouver le bon équilibre en se concentrant sur ce qui fait l’essence du personnage. Ils trouvent un angle très astucieux dans le fait que la plupart des méchants des précédents films sont morts dans leur réalité/ films respectifs en affrontant le  héros. Le dilemme qui se pose ici à Peter semble sorti d’un comic-book classique : en voulant sauver ses vilains alors qu’il serait plus simple de les renvoyer dans leur dimensions pour mourir, Peter décide de faire ce qui est juste plutôt que de choisir la facilité mais ses actions ont des ramifications pour lui et ses proches, qui mettent l’adolescent à l’épreuve comme jamais auparavant. Le fait d’avoir placé cette aventure au moment où il va quitter le lycée et de traduire cette peur que chacun connait de voir ses amis vous oublier dans l’hésitation que Parker connait au moment où Strange va jeter son sort est ingénieux. On a beaucoup critiqué le fait que la proximité de Peter Parker avec l’héritage de Tony Stark dans le MCU l’éloignait des racines du personnage. Mais sans cela la conclusion de No Way Home n’aurait sans doute pas été aussi satisfaisante. Si la première partie est moins fluide car elle doit mettre en place les enjeux, introduire ses antagonistes quand le film abat enfin toutes ses cartes il se montre à la hauteur des attentes. Malgré les multiples méchants, personnages principaux et intrigues, chaque protagoniste a son moment sans que le film apparaisse surchargé. L’humour y est très présent mais il a toujours fait partie de l’essence de Spider-Man et quand le film devient plus sérieux, l’humour s’ajuste en conséquence, naissant de la dynamique entre les personnages sans saper les moments émouvants du film. Évidemment certains reprocheront au film son fan service mais Watts et ses scénaristes utilisent ces références meta de façon à la fois drôle et émouvante. Si le film est présenté comme un évènement massif à l’échelle de la franchise Spider-man comme le fut Avengers Endgame , Jon Watts et son équipe ont l’intelligence de conserver sa légèreté et aspire malgré des moments de drame et d’émotion à être avant tout un grand divertissement, un event-movie familial qui a vraiment l’esprit des numéros doubles ou des annuals des comic-books.

Comme toute  bonne histoire de Spider-man No Way Home confronte Peter Parker à des défis toujours plus grands pour tester ses limites et éprouver ses valeurs quel qu’en soit le prix, donnant à Tom Holland à jouer une large palette entre spontanéité juvénile et gravité. Il partage un lien crédible et chaleureux avec Jacob Batalon et sa relation avec Zendaya parfaite de naturel en MJ est touchante et romantique. Pour ne rester que sur les principaux personnages apparaissant dans le marketing  les vilains de la trilogie de Sam Raimi Green Goblin (Willem Dafoe) et Doc Ock (Alfred Molina) extraits  de leur univers (avant leur mort) sont ramené par les effets de maquillage numérique ou physiques à leur apparence d’il y a 20 ans. Les acteurs semblent prendre plaisir à ce retour inespéré offrant des performances qui sont des  extensions de leurs arches narratives de leurs films respectifs. Le personnage d’Electro toujours incarné par Jamie Foxx connait lui un relooking complet qui lui permet sur les mêmes bases de le rebâtir. L’expression de ses pouvoirs parvient à évoquer le visuel du méchant des comics et l’écriture de son personnage est bien meilleure et en fait un antagoniste crédible. Les films de Spider-man version Tom Holland ressemblent beaucoup à la série Marvel Team-Up le premier titre dérivé  d’Amazing Spider-Man qui présentait  à chaque numéro le héros en tandem avec d’autres personnages de la firme. Après Iron man dans Spider-man Homecoming et Nick Fury dans Spider-man Far from Home  c’est au tour du Doctor Strange de faire équipe avec le tisseur. Benedict Cumberbatch le joue avec plus de malice et d’humour que dans ses apparitions précédentes mais cette version correspond au ton du film. Strange n’est pas ici un mentor ou une figure paternelle pour Peter comme l’était Tony, mais ils ne sont pas tout à fait égaux non plus.

Alors que la mise en scène de son premier film Cop Car semblait très assurée Jon Watts n’apporte pas ici d’identité visuelle propre à son film qui reprend les normes visuelles déjà en place dans les précédents films du studio. Aussi spectaculaire et réussi qu’il soit, l’affrontement entre Dr Strange et Spider-man  ne fait que reprendre les motifs établis par Scott Derrickson, les séquences d’actions sont massives et cinétiques mais l’omniprésence des effets visuels numériques les prive de viscéralité (à l’exception d’une confrontation en lieu clos, brutale avec le Green Goblin) . Hormis quelques plans trop fugaces le brillant directeur de la photographie Mauro Fiore (Avatar, Training Day) ne parvient pas à échapper à la malédiction de l’étalonnage des films Marvel qui tend à  uniformiser leur style visuel. Mais les attentes qui reposent sur le film se situent ailleurs, en particulier sur la représentation satisfaisante et les interactions de personnages familiers qu’on auraient jamais imaginé partager des scènes ensemble, je veux bien sur parler des précédents interprètes de Spider-man Andrew Garfield et le « OG » Tobey Maguire qui font ici leur retour à l’écran. C’est un plaisir de les voir se glisser à nouveau dans le rôle (en particulier Garfield qui n’a jamais été aussi bon dans le rôle que dans ces quelques minutes) et d’interagir avec la version de Tom Holland. Leurs échanges sont à la fois drôles, tendrement moqueurs et même émouvants quand ils évoquent le sort de leurs versions après les films. On est surpris que les trois comédiens fassent preuve d’une telle entente , le scénario leur donne à chacun un moment pour briller et offre une belle conclusion à leurs parcours. De ce point de vue Watts confirme son talent pour la direction d’acteurs que ce soit avec  ses jeunes comédiens qu’avec des vétérans comme Molina ou Willem Dafoe qui semblent sincèrement s’amuser de leur retour dans l’univers Spider-Man y ramenant  les tourments de Norman Osborn et la folie cruelle du Bouffon Vert. Et évidemment le retour des La version de  Tante May incarnée par Marisa Tomei trouve probablement son rôle le plus développé à ce jour, elle contribue à ajouter un peu de gravité dans la deuxième partie du film pour amorcer le final.  Le compositeur Michael Giacchino  livre une partition formidable qui mélange de façon harmonieuse tous les grands thèmes de l’histoire du personnage.

Conclusion : Divertissement rythmé et léger malgré de multiples vilains et le poids du fan-service Spiderman No Way Home parvient à trouver un bel équilibre entre la poursuite des aventures de Spidey dans le MCU et la célébration de 20 ans d’adaptations cinématographiques en se concentrant sur l’essence du personnage.

Ma Note : B++

Un commentaire

  1. Un épisode à la croisée des générations qui réussit le pari de gérer harmonieusement la foule des personnages. Effectivement, la réalisation manque un peu d’audace visuelle (mais il y a ce superbe générique de fin) mais le scénario l’emporte largement, et surpasse dans le genre le poussif « Spider-Man 3 ».

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